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Crises de mer

3 décembre 2009.

Christophe Tostain

Crises de mer est la première Itinérance livrée par Christophe Tostain, auteur, comédien, qui vit dans la région. Avec sa langue minutieuse et précise, il choisit de confronter deux régions face au naufrage de l’industrie ouvrière. Crises de mer est le fruit d’une commande d’écriture sous forme de résidence passée à Christophe Tostain par le Tanit Théâtre à Lisieux. Avec Bruno Allain, Eugène Durif et Serge Valletti, ils se sont donc immergés deux mois durant dans le Pays d’Auge. « Que deviennent les laissés pour compte, comment vivent ceux dont les professions sont directement liées au monde agricole et ouvrier qui se désagrège ? C’est pour essayer de rencontrer ” ceux-là ” que le Tanit Théâtre a demandé à ces quatre auteurs de s’imprégner de leur quotidien pour piocher, récolter, faire ressurgir ces témoins du presque passé… »
Après Lamineurs (éditions 34) qui évoquait déjà la fin du monde ouvrier inspiré par la fermeture de l’usine Moulinex près de Caen, Christophe Tostain s’est attaché au naufrage de l’industrie ouvrière sur le littoral normand. Crises de mer met en scène une mère (Elisabeth Tual) et son fils (Arnaud Aubert) qui vivent là sans père, juste à côté de la mer. Elle, travaille chez un patron capitaliste, tient la baraque, lutte contre la solitude, plonge dans les livres. Lui, le travail lui pose problème, on ne sait pas ce qu’il fait quand il sort et revient à marée basse. Lui, de déception en désœuvrement. Elle, ressasse… Elle, se tourne vers l’avenir pour que subsiste le passé. Lui, est résolument tourné vers la mer, la côté, les flashs, les lumières. En début d’année, Christophe Tostain avait répondu aux questions de Livre/Echange.

Livre/échange : Qu’est-ce qui vous a séduit dans le projet du Tanit Théâtre, « Itinérances » ?
Christophe Tostain :
Je travaille depuis longtemps avec Eric Louviot, le directeur du Tanit. Eric Louviot porte toujours un œil attentif sur les activités des êtres qui l’entourent. Ainsi, je lui ai toujours donné mes textes à lire. Je dois dire que je suis étonné : à chaque fois, ça lui plaisait beaucoup, beaucoup !  Il est également très axé sur les auteurs contemporains. Ce projet, Itinérances, Eric le portait depuis longtemps.

L/é : Vous avez choisi de travailler sur l’effacement des petites industries et de la vie ouvrière du littoral au profit d’une fréquentation people et éphémère de la côte ? Pourquoi ce choix ?
C. T. :
En réalité, je n’ai pas choisi ! Les thèmes nous ont été imposés. En fait, c’est mon texte, Lamineurs*, qui a été le déclencheur pour Eric Louviot et lui a donné l’idée de me réserver ces territoires. Ma commande d’écriture porte sur Tréfimétaux qui fut une grosse industrie à Dives-sur-mer et qui a fermé fin 1986. L’idée, c’est d’aller sur le territoire, puiser dans la mémoire ouvrière. Ce qu’il faut savoir, c’est que depuis, Eurocel, une usine créée pour réintégrer des personnes licenciées de Tréfimétaux, a aussi fermé ses portes. Une cité balnéaire a été reconstruite. J’y suis allé, je trouve ça très neuf, très vide, très mort.

L/é : Comment allez-vous procéder ?
C. T. :
La difficulté est de ne pas réécrire ce qu’on a déjà écrit, de rebondir différemment. Je me suis rendu à Dives-sur-mer pour la première fois en octobre dernier. C’était la première journée de manifestation du personnel, pour obtenir des indemnités, suite à la fermeture d’Eurocel. Ce fut très intense. J’ai parlé avec quelques personnes. Mais lorsque je dis que je suis auteur dramatique, cela devient plus difficile ? Je souhaiterai aussi planter une caméra lors des entretiens.

L/é : D’où vient votre intérêt pour la disparition du monde ouvrier ?
C. T. :
C’est vrai que j’avais écrit Lamineurs dans ce sens-là. Je l’ai écrit suite à la lutte des intermittents et à l’annulation du festival d’Avignon auquel j’étais sensé participer d’ailleurs. Je me suis donc retrouvé au cœur de la manifestation, de ce qui polarisait ce combat cet été-là. J’avais cette révolte en moi, mais il fallait que je trouve un biais pour l’exprimer. Jusqu’au jour où je suis tombé sur un échange entre Ernest-Antoine Seillière, alors président du MEDEF, et son vice-président, Denis Kessler. A Kessler qui lui disait qu’il était un fondeur suite à la réforme de l’industrie en France, Seillière avait répondu qu’il était en réalité, un lamineur. Je suis parti de ce mot qui avait pour moi un triple sens : le métier [laminer, c’est réduire une masse métallique, en feuilles, en lames ou en barres minces, en comprimant fortement] ; la note de musique ; la jeune fille. A la mise en scène, je voulais intégrer de la vidéo. En filmant notamment des images d’usine. A l’époque, Moulinex à Cormelles-le-Royal était déjà fermé. J’ai rencontré des anciens employés qui s’y réunissaient régulièrement. Et j’ai vu à quel point combien être victime d’un plan social pouvait être destructeur. Sur le plan familial, mais aussi individuel et psychologique. Il y a une inhumanité fondamentale, inacceptable. Et de mon côté, je ne peux écrire que s’il y a révolte, au départ. Elle est mon moteur.

Propos recueillis par Nathalie Colleville

Les 7 et 8 janvier à 20h30 au Tanit Théâtre. Réservation indispensable au 02 31 62 66 08.
Au Tanit Théâtre, La Filature, 11 rue d’Orival à Lisieux. Avec le soutien du Centre régional des Lettres de Basse-Normandie.
www.tanit-theatre.com

Itinérances, résidences d’auteurs et commandes d’écriture
Ce nouveau projet, conçu par Eric Louviot et coordonné par la dramaturge Véronique Piantino, est lié « à la mutation des territoires, à leur nouvelle logique, à la perte des traditions ouvrières et agricoles, aux abandons des ressources historiques pour répondre à un besoin d’image et de représentation, comme la vitrine d’un pays mis sous verre, vite regardé et traversé par la horde des touristes saisonniers. Mais cet arrière pays d’Auge, maintenant presque pays inférieur, comme on disait jadis, que deviennent les laissés pour compte, comment vivent ceux dont les professions deviennent obsolètes dans cette société ? Où vont-ils , que vivent-ils ? C’est pour essayer de rencontrer « ceux-là » que [le Tanit Théâtre a] demandé à quatre auteurs de s’imprégner de leur quotidien pour piocher, récolter, faire ressurgir ces témoins du déjà presque passé. »

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